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Entre visillos

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Ediciones Siruela
Auteur: Carmen Martín Gaite
Lecteur: Philippe LANÇON

Les dictatures archaïques accouchent de romans modernes. Ce sont des contrepoisons: pas de psychologie ni de morale apparentes; les paroles, les dialogues, les gestes, restitués par une oreille et un œil sûrs, précis, auxquels rien n’échappe du groupe social observé et des individus enfermés qui le composent. Tel est le cas d’Entre visillos, Entre les rideaux, premier roman de Carmen Martin Gaite. Il est écrit en 1957 –deux ans après la publication du Jarama de Rafael Sanchez Ferlosio, qui était alors son époux, et auquel beaucoup l’apparente, forme et fond. Que ce livre classique n’ait pas été traduit fait partie des mystères qui jalonnent le chemin difficile en France de la littérature espagnole –et particulièrement de la littérature écrite à l’époque du franquisme.

Un homme, Pablo Klein, arrive dans une ville de province espagnole à la fin de l’été. Un chapitre sur deux, c’est lui qui raconte. A commencer par sa découverte de la ville, inspirée par Salamanque, où est née l’auteur. Il vient prendre un emploi de professeur d’allemand qui lui a été promis par l’un de ses amis, directeur de l’Institut de Salamanque. Mais, quand il arrive, cet ami vient de mourir. Pablo l’ignorait. Il va chez lui et tombe sur la veillée funèbre. Scène étonnante, où le visiteur imprévu paraît ne gêner personne, comme s’il n’existait pas, jusqu’au moment où la fille du mort le reconnaît parce qu’elle les a vus sur une photo, lui et son père, comme deux fantômes. La société espagnole sous Franco n’est-elle pas un vieux musée rempli de fantômes? C’est par elle qu’on en apprend un peu plus –très peu- sur ce Pablo qui nous parle à peine de lui. Tout juste sait-on qu’il a passé ici une partie de son enfance et qu’il essaie de faire coller, sans y parvenir, ce qu’il voit à ce dont il se souvient. Une scène résume la situation de Pablo. Il passe sur un pont qui enjambe la voie ferrée. Un train passe et lui crache dessus, dit-il, « un gros nuage de fumée dense et rouge. J’ai fermé les yeux. Tout le pont continuait à vibrer. Quand je les ai ouverts, le train était déjà loin, avec sa lumière rouge. Un couple d’amoureux s’était accoudé à la rambarde près de moi et ils regardaient le train s’éloigner, les visages collés, les bras entrecroisés par derrière, extasiés. « C’est celui du Portugal, tu sais, mi vida? » Ils ne m’avaient même pas vu. Je les ai enviés. »

La mort pourrait remettre en cause l’emploi qu’il était venu prendre, mais Pablo n’en est pas affecté. C’est un voyageur sans destination, presque sans bagage. Il semble aller là où le vent le porte dans un monde –celui de l’Espagne des années 50- où tout et chacun est paralysé et comme épinglé à une place, dans une vitrine mesquine et mal aérée. Pablo passe et dépoussière la vitrine par son absence, son flottement, son indétermination, son incapacité à entrer dans une fonction précise et inamovible. La fille du mort lui dit: « Seul quelqu’un qui vit ici peut finir par se résigner à ce qui se passe ici, et il peut même finir par croire qu’il vit et qu’il respire. Mais moi, non! Je n’étouffe pas, je ne me résigne pas, je désespère. » Bientôt, il sera ainsi témoin, presque confesseur, de jeunes filles que cette existence soumet, étouffe ou révolte.

Ce sont elles, en effet, qui parlent, un chapitre sur deux, d’un bout à l’autre du livre: de longs dialogues sur tout et sur rien, les garçons, les savons, les habits, l’ennui, les bijoux, les fêtes au Casino, l’été passé à San Sebastian, le mariage, qui restituent par le détail les rêveries empêchées de ces gamines condamnées à la médiocrité. Il y a quelque chose de la minutie des Primitifs Flamands dans ce retable de la vie quotidienne en province sous Franco. Traduire ce livre, comme traduire le Jarama, est une nécessité, mais ce n’est pas une mince affaire: il faut retrouver tout ce qu’il y a d’éternel dans ce langage –celui des jeunes filles- daté. Car la qualité de l’œuvre tient, entre autres, au fait que sa construction, sa netteté, rend la tonalité (et les consciences adolescentes) d’une époque sans jamais céder au moindre effet de folklore.

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