Ce roman est l'œuvre d'un auteur qui a déjà fait ses preuves, reçu des prix littéraires et montré que le choix de l'intemporalité et du style qu'elle appelle ne sont pas des options à jamais révolues malgré les réserves de ceux qui tiennent à tout prix à la modernité.
El otoño de la casa de los sauces parvient à être le livre que se proposait d'écrire son auteur: un roman allégorique, triste, traversé par les éternels grands thèmes de la condition humaine: la culpabilité, la mémoire, l'amour et la mort avec en toile de fond une époque de dictature et de révolution (non précisée, ce n'est pas un roman historique au sens strict du terme) qui se présente comme la version stylisée et abstraite de tout un pan de l'histoire européenne.
Le héros du roman, Zigor, est un homme fortuné qui est en train de mourir d'un cancer (phase terminale) et décide d'affronter le grand secret de sa jeunesse: l'appartenance à une organisation terroriste qui luttait contre le régime d'oppression qu'il avait vécu dans sa jeunesse.
Selon une mise en scène théâtrale, Zigor convoque ses anciens camarades de combat dans une demeure peuplée de maîtres et de domestiques. Le lecteur assiste à l'arrivée des invités au fur et à mesure qu'ils font irruption. Le maire Conrado (et sa femme Gracia qui n'est pas au courant du passé de son mari); l'impavide Fausto; Ramiro, commissaire général de la République; Brenda qui a perdu sa fraîcheur et sa séduction; le curé Orlando; Olenka et Doralisa. Face à ces neuf personnages (en comptant les amphitryons), s'ajoutent des personnages mineurs dont le rôle n'est pas négligeable, Inga, Telmo, Águeda, Terina et Bárbara qui dialoguent et intercèdent auprès des invités en leur donnant l'occasion d'exprimer leurs impulsions et leurs souvenirs. Les remords, les intrigues et les contradictions affleurent à foison et constituent ce qui pourrait être l'histoire reconstituée par les êtres qui ont survécu. La très belle écriture castiza d'Argüelles rend ce roman qu'on penserait à tord d'un autre temps inoubliable.