Né en Espagne, Juan Alcudia est d’abord connu comme auteur et scénariste de bande-dessinée sous le nom de « elchinodepelocrespo ». En tant qu’écrivain, il a publié plusieurs nouvelles d’horreur et il signe sa première anthologie personnelle en 2014 aux éditions Atlantis : elle s’intitule Hijo de un dios canibal (Fils d’un dieu cannibal) et articule interrogations ésotériques et réflexions sur la violence dans notre société. Ses œuvres explorent les registres de la science-fiction et de l’horreur, rendant hommage aussi bien à Lovecraft qu’à Edgar Allan Poe, en passant par Gustav Meyrink ou encore Yoshiharu Tsuge. Il a également publié deux recueils de poésie qui témoignent de la qualité de sa plume : avec Memorias de una barba (Mémoires d’une barbe), publié aux Editions En Huida en 2017, il s’éloigne de l’horreur pour aborder la question de la folie dans notre société, tandis que dans Hambres y cuchillos (Faims et couteaux), publié en 2020 aux Editions Amarante, il propose un voyage dans l’Histoire et les légendes perdues, convoquant des dieux et des créatures fantastiques pour ouvrir, entre cruauté et mystère, une réflexion sur l’existence.
Lluvia roja sobre el Tibet (novembre 2021, Maldragón Editorial, Madrid, Espagne) est le premier roman de cet auteur aux multiples facettes. C’est l’histoire d’un assassin professionnel qui décide de fuir l’organisation à laquelle il a appartenu pendant des années et se retrouve dans Le Cœur de Minuit, une auberge hostile, entourée d’une muraille inquiétante. Gardée par l’impressionnante Mole, une réceptionniste qui tient plus de l’animal que de l’humaine, elle abrite des hôtes tout aussi intrigants. Aux frontières du fantastique et de l’horreur, entre le rêve et la souffrance psychique, on y retrouve le thème de la folie, cher à Juan Alcudia : celle-ci conduit alors à l’hallucination, à l’obsession et à la paranoïa car le protagoniste est persuadé qu’il est poursuivi et que cette personne, envoyée pour le tuer, se cache quelque part dans Le Cœur...
Ce roman a tous les ingrédients du thriller haletant, rythmé par les nuits obscures d’un protagoniste malade et les rencontres surnaturelles avec les différents hôtes du Cœur. Présenté comme le journal de bord de l’enquête du protagoniste, les passages narratifs à la première personne alternent avec les prises de notes et les dessins, symboles mystérieux et plans qui confèrent une dimension visuelle à ce livre hors du commun. Les descriptions sont crues et parfois mêmes provocantes lorsqu’elles détaillent les corps poussés jusque dans leurs limites. Mais la violence côtoie toujours la poésie, à travers l’omniprésence du rêve et la richesse d’un langage qui, sans chercher la métaphore, est pourtant riche de multiples symboles. On retrouve alors le talent de l’auteur pour l’horreur et la fantasy, mais aussi sa passion pour les légendes et l’ésotérisme. Au-delà d’un simple thriller, la puissance de la plume d’Alcudia et le tour-de-force de ce roman résident ainsi dans la création d’un huis-clos qui devient un univers et happe le lecteur dans les méandres de la psyché du protagoniste fou, jusqu’à la déconstruction progressive de l’intrigue, du personnage et de l’écriture elle-même. Ne restent plus que la lumière et cette sensation étrange d’avoir parcouru un voyage dans un univers mystérieux, aux confins de la raison et de la littérature...
Thierry Clermont est journaliste au Figaro littéraire depuis 2005. Il a été membre de la commission poésie du Centre national du livre....
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Diplômé de l'École Normale Supérieure et spécialiste des lettres modernes, de l'espagnol et de l'anglais, Clément Ribes....
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