Dans le port de pêche de Lútaca, en Galice, el Caracán, sans-abri depuis la mort par noyade de sa femme et sa fille, vit dans un entrepôt avec la petite chienne Cuca, qu’il a sauvée d’une mort certaine sur des voies de chemin de fer. Un jour de tempête, el Señorina, chauffeur d’Aldolfo Santos, patron de la conserverie de la ville, vient le frapper et le somme de quitter la région. Le lendemain, tous les habitants de Lútaca se réveillent, transformés en chiens. Chez certains, comme le journaliste et narrateur Baltazar Bellatierra ou Adolfo Santos, la première réaction est de chercher à se suicider. Heureusement pour Baltazar, la fille de sa voisine Clara, prénommée Bea, l’en empêche et le pousse à ne pas se lamenter sur son sort. El Señorina est métamorphosé en chien blanc, El Caracán en chien noir. La stupeur passée, la lutte pour la survie commence, et le lecteur se rend vite compte que El Caracán est le plus débrouillard de tous : en compagnie d’autres chiens, il s’installe dans un immense tonnelier dont il apprend à régler le congélateur. Une horde ne tarde pas à le rejoindre. Ils ont de la nourriture pour plusieurs années. Baltazar et Bea, après avoir erré dans la ville, se retrouvent dans une église où un prédicateur canin doué de la parole fait des ravages et pratique le cannibalisme. Ils sont sauvés in extremis par les troupes du Caracán. Bea part en bateau, persuadée que sa mère est sur l’île face à la ville, ce qui est vrai. Clara, prostituée, est tombée entre les pattes de sinistres mâles qui l’exploitent ainsi que ses consœurs. Elle parvient à s’enfuir, rejointe par sa fille et Baltazar, et tous s’installent dans des bateaux du port.
Un roman bien plus profond qu’il n’y paraît, où les hommes transformés en chiens n’ont bien entendu pas les aptitudes des vrais chiens à survivre. Ils continuent de s’exprimer au moyen de mots qu’ils écrivent dans le sable ou sur des ardoises qu’ils transportent avec eux. Les réflexions de Baltazar sont d’ordre philosophique et posent la question de savoir si la métamorphose est comparable à une perte humaine. Les scènes d’action sont haletantes, les personnages très variés, et la leçon à tirer de l’étrange cataclysme est qu’il faut toujours aller de l’avant sans se laisse miner par une nostalgie néfaste. Passionnant.