Lecteur : André Gabastou
Après des études de philologie anglaise, Eva Gallud s'est consacrée professionnellement à la traduction. Elle a traduit des poètes comme Emily Dickinson, Margaret Sackville et des prosateurs comme Edith Warton, Guy de Maupassant et D. H. Lawrence. Elle a publié des recueils de poèmes et Les Années obscures est son premier roman.
Les Années obscures décrit un voyage dans l'obscurité entrepris à partir de la luminosité la plus absolue. Une jeune fille cherchera dans Madrid la lumière pour ressusciter son père qui, toute sa vie, s'est efforcé d'être un homme mort, évoquera la solitude qui triomphe dans notre siècle et critique férocement la solitude à laquelle nous soumettent les contraintes sociales pour nous laisser encore plus seuls.
Il s'agit d'une traversée qui mêle à chaque page dans un hôpital de Madrid où un père agonise atteint d'un cancer l'exactitude émotionnelle et le libre arbitre.
C'est une histoire d'abandons et de pères prodiges qui tombent avec tout le poids de corps morts dans les bras inexpérimentés de leurs enfants qui les évoquent avec une pudeur infinie dans des histoires étrangères à tous les atermoiements. Histoires de secrets, de délires (les rapports entre la narratrice et une mystérieuse femme française nommée Solange) et de miroirs qui font que la protagoniste observe la vie comme si la mémoire était le maître du monde.
On pense à L'Etranger de Camus à cause de l'adéquation entre le propos et la langue, mais pas seulement. Cette économie du récit permet à la langue d'aller au plus près du propos et s'avère d'une grande pertinence. Rien n'y semble faux, le ton est toujours juste. Un grand et saisissant premier roman sur l'absurdité et la détresse affective.